LE SENS CHRÉTIEN DE LA SOUFFRANCE HUMAINE (3)
LECTURE DE LA LETTRE APOSTOLIQUE SALVIFICI DOLORIS (11 février 1984)
DU PAPE JEAN-PAUL II


La recherche de la réponse à la question du sens de la souffrance

 

La souffrance éveille deux grandes questions dans le cœur de l'homme : Pourquoi ? et Pour quoi ? La première porte sur l'origine, la cause, la raison de la souffrance ; la seconde sur son but, sur le sens. Quand ces questions difficiles, jointes à celle du mal, que l'homme pose à l'homme et à Dieu, ne trouvent pas de réponse, la souffrance est encore plus pénible. Elle peut conduire jusqu'à « la né­gation même de Dieu » (n° 9).

 

Alors que l'existence et la beauté de la création « ouvre le regard de l'âme humaine à l'existence de Dieu, à sa sagesse, sa puissance et sa magnificence, le mal et la souffrance semblent obscurcir cette image, parfois de façon radicale » (n° 9), spécialement lorsque l'on considère la souffrance des in­nocents et les injustices.

 

Mais la question du sens de la souffrance, que l'homme pose à Dieu, Celui-ci l'attend et l'écoute comme le montre l'Ancien Testament, particulièrement le livre de Job où cet homme frappé dans ses biens, sa famille et son corps doit en outre subir les sermons réducteurs de ses “amis” qui rat­tachent sa souffrance à une faute grave qu'il aurait commise. « Pour eux, [la souffrance] ne peut avoir de sens que comme peine pour le péché » (n° 10). Elle découlerait donc uniquement de la jus­tice de Dieu « qui récompense le bien par le bien et punit le mal par le mal ».

 

Mais Job, conscient de son innocence, conteste le principe qui identifie souffrance punition du pé­ché. À la fin du livre, Dieu lui-même reproche aux amis de Job leurs accusations et reconnaît que Job n'est pas coupable. La souffrance apparaît donc aussi, nous dit Jean-Paul II, comme « un mys­tère que l'intelligence de l'homme n'est pas en mesure de pénétrer à fond [...] S'il est vrai que la souffrance a un sens comme punition lorsqu'elle est liée à la faute, il n'est pas vrai au contraire que toute souffrance soit une conséquence de la faute et ait un caractère de punition » (n° 11).

 

Alors, pourquoi et pour quoi la souffrance de Job ? « De l'introduction du Livre, il ressort que Dieu a permis cette épreuve en raison de la provocation de Satan. [...] Et si le Seigneur consent à éprou­ver Job par la souffrance, il le fait pour montrer la justice de ce dernier. La souffrance a un carac­tère d'épreuve » (n° 11). Toutefois, le livre de Job n'apporte pas une réponse définitive au problème de la souffrance. L'Ancien Testament montre par ailleurs « la valeur éducative » de la souffrance. Le Pape note que « c'est là un aspect extrêmement important de la souffrance » (n° 12). Par miséri­corde, Dieu peut châtier pour amener à la conversion, comme le montre le second livre des Macca­bées : « Ces persécutions ont eu lieu non pour la ruine mais pour la correction de notre peuple » (2 Mac 6,12). La souffrance peut donc viser « à la reconstruction du bien » (n° 12) dans la personne et dans ses rapports à autrui et surtout à Dieu.

 

Si jusqu'ici, nous avons plutôt chercher la réponse au pourquoi de la souffrance du côté de la justice divine, nous devons maintenant contempler la révélation de l'amour divin, car, nous dit le Pape, même si la souffrance demeurera un mystère, même si nos explications seront toujours insuffi­santes, « l'amour est la source la plus complète de la réponse à la question sur le sens de la souf­france[1]. Cette réponse a été donnée par Dieu à l'homme dans la Croix de Jésus-Christ » (n° 13).


[1] « C'est une dimension différente de celle qui [...], en un sens, l'enfermait dans les limites de la justice » (n° 14).

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