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COMMENTAIRE DU PSAUME 41

 

Introduction

 

Ce psaume, comme beaucoup d'autres, parle de maladie grave, de sarcasmes, de culpabilité, de confession des manquements, de pardon et de guérison. Il est, en bref, une action de grâce à la suite d'une guérison advenue après confession des fautes et supplication adressée au Seigneur. Il présente particulièrement des affinités avec le Ps 32 : macarisme initiale ; présence de l'incise « j'avais dit » (v. 5) qui introduit couramment le rappel de circonstances tragiques d'où l'on est sorti (cf. Ps 30, 7 ; 73, 15) ; emploi du mode narratif et non déprécatoire (v. 11-13). Le psalmiste entend léguer à autrui une leçon d'humilité et de confiance en Dieu.

 

Commentaire

 

1 Du Maître de chant. Psaume. De David.

2 Heureux qui pense au pauvre ;
au jour de malheur, le Seigneur le délivrera.
3 Le Seigneur le gardera ; il lui rendra vie et bonheur sur terre ;
il ne le livrera pas à ses ennemis.
4  Le Seigneur le soutiendra sur son lit de douleur ;
tu referas tout entière la couche où il languit.

 

Le psalmiste commence par donner une leçon de sagesse : le Seigneur se montre clément à l'égard de celui qui est miséricordieux. Jésus résumera ces versets dans l'une des béatitudes : « Heureux les miséricordieux, ils obtiendront miséricorde » (Mt 5, 7). Celui qui prête attention au pauvre peut être dans le malheur et le péché, YHWH reste son salut. Ici la perspective demeure celle d'une rétribution temporelle qui, comme le montrera le livre de Job, ne résiste pas à l'expérience. Avec le Christ, une espérance certaine s'ouvre pour le juste.

 

La béatitude du verset 2 est surprenante, car habituellement c'est toujours l'attitude envers YHWH qui est proclamée source de bonheur. Ici, c'est le souci accordé au faible qui entraîne la bénédiction divine. Ce rapprochement entre Dieu et le pauvre prendra encore une dimension nouvelle en Jésus qui s'identifiera à tous les malheureux (cf. Mt 25, 31-40).

 

5 Moi, je disais : " Seigneur, prends pitié de moi ;
guéris-moi car j'ai péché contre toi ".

 

Le psalmiste fait maintenant le récit de l'épreuve personnelle qu'il a endurée ; il a connu la pauvreté morale et physique, et rappelle sa supplication ainsi que la confession de ses fautes. Maladie et péché étaient alors considérés comme liés.

 

6 Mes ennemis disaient du mal de moi :
" Quand mourra-t-il ? Quand son nom perira-t-il ? "
7 Lorsqu'ils entraient chez moi pour me rendre visite, ils déblatéraient des vanités ;
leur coeur faisait provision d'iniquité,
et en sortant ils me détractaient.

 

À la maladie du psalmiste s'ajoutaient des visites de gens qui n'étaient pas sincères. On guettait sa mort pour s'en réjouir, on ne lui tenait que de vains discours et on le détractait une fois qu'on l'avait quitté.


8 Tous mes ennemis chuchotaient ensemble contre moi ;
ils cogitaient des méchancetés contre moi :
9 " Un maléfice a été répandu sur lui ;
maintenant qu'il est couché, il ne pourra plus se lever ".

 

Les « chuchotements » des ennemis évoquent la voix des magiciens et des charmeurs (Ps 58, 6 ; Si 12, 18). Il y a donc peut-être ici une allusion à des pratiques magiques pour hâter la mort du psalmiste. Ses ennemis machinent le pire contre lui et se réjouissent à l'idée qu'il ne se lèvera plus de son lit, qu'il ne ressuscitera pas...

 

La « parole/chose de Bélial » (TM), expression traduite « maleficium » dans la Néo-Vulgate, versée dans le psalmiste comme un poison, est peut-être effectivement une malédiction que l'on veut efficace, une formule magique.

 

10 Même mon ami, en qui j'avais confiance ;
oui, même mon compagnon a levé son talon contre moi.

 

Circonstance plus pénible encore : même son intime (cf. Jr 20, 10), son compagnon, en vient à faire sien les sentiments de ses ennemis et ne désire rien d'autre que de le piétiner.

 

11 Mais toi, Seigneur, prends pitié de moi ;
relève-moi et je les rétribuerai.

 

À la différence des ennemis du psalmiste, Dieu reste accessible à la pitié. Le psalmiste n'a plus que lui ; c'est de lui dont il espère son salut physique et spirituel. C'est de lui qu'il attend son relèvement, sa résurrection. Comment ne pas penser à ce qu'écrit le Pape Benoît XVI dans l'encyclique Spe Salvi : « Si je ne peux plus parler avec personne, si je ne peux plus invoquer personne – je peux toujours parler à Dieu. S'il n'y a plus personne qui peut m'aider – là où il s'agit d'une nécessité ou d'une attente qui dépasse la capacité humaine d'espérer, Lui peut m'aider. Si je suis relégué dans une extrême solitude... ; celui qui prie n'est jamais totalement seul » (n° 32).

 

Comment comprendre le et je les rétribuerai ? Il semble bien que le psalmiste veuille que ses ennemis reçoivent de lui un châtiment quand il aura recouvré la santé (cf. Ps 137, 8 ; Jl 4, 4 ; Jr 50, 29). Il voudrait donc se faire justice lui-même. En Jésus, cette rétribution prendra la forme paradoxale du pardon et se fera par le don de la vie éternelle. S. Paul ne dit-il pas que le Christ est « ressuscité pour notre justification » (Rm 4,25) ?

 

12 En cela j'ai su que tu m'aimes :
mon ennemi ne se réjouira pas à mon sujet.
13 Tu m'as soutenu en raison de mon innocence
et tu m'as établi devant toi à jamais.

 

Le psalmiste a vu sa prière exaucée. Le salut lui est finalement venu de son Dieu qui voyait son innocence foncière, et désormais lui-même se tient pour toujours devant sa face, ce qui est peut-être une allusion à la participation à la liturgie du Temple. Le mystère qui plane sur ces derniers versets ne sera pleinement dévoilé qu'avec la résurrection du Christ.

 

Le Ps 41, qui conclut le premier livre du Psautier, affirme que les justes dans le malheur seront délivrés par Dieu de toutes leurs épreuves. Par contre, ceux qui n'ont pas pitié du faible courent à leur perte. Le bonheur est promis à celui qui se tourne vers Dieu et vers le faible. À la béatitude du Ps 1 fait écho celle du Ps 41. Chercher Dieu dans la Torah, le chercher dans le pauvre, c'est tout un. Le juste « désire » la loi de Yahvé (Ps 1, 2), YHWH « désire » le juste (Ps 41, 12).


14 Béni sois le Seigneur, Dieu d'Israël,
depuis toujours et à toujours.
Amen. Amen.

 

Doxologie qui conclut le premier livre du Psautier comme elle conclura les trois livres suivants (Ps 72 ; 89 ; 106). Ces bénédictions, fréquentes dans le Psautier (Ps 31, 22 ; 41, 14 ; 66, 20 ; 68, 20.36 ; 72, 18 ; 89, 53 ; 106, 48 ; 118, 26 ; 124, 6 ; 135, 21 ; 144, 1), assurent une atmosphère de louange et d'action de grâce à l'ensemble de ce livre biblique. Le « amen » en hébreu, signifie l'adhésion ferme à ce qui vient d'être dit. Il vient confirmer la déclaration qui précède, ici la bénédiction. Son redoublemement vise à l'emphase, à l'insistance.