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COMMENTAIRE DU PSAUME 2

Introduction

De même que le Psaume 1, le Psaume 2 ne porte pas de titre. En fait, il pourrait être un fragment devenu indépendant du Psaume 1, comme le supposent certains manuscrits grecs qui, en Ac 13, 33, citent le verset 7 en précisant : « selon ce qui est écrit dans le Psaume 1er ». Outre la béatitude qui les encadre (Ps 1, 1 ; 2, 12), de nombreux mots leur sont communs. Mais quoi qu'il en soit, le juste par excellence dont parle le Psaume 1 et qui est affronté aux ennemis de Dieu, c'est le messie, le fils de Dieu, le roi d'Israël. Le Psaume 2 oppose le roi-messie du Seigneur et les rois des nations qu'il invite à réfléchir, à se laisser corriger et à servir Dieu.

1 Pourquoi les nations frémissent-elles, et les peuples roucoulent-ils des vanités ?
2 Les rois de la Terre se sont dressés, et les princes se sont réunis
contre le Seigneur et contre son messie (oint ; christ) :
3 “Rompons leurs liens
et rejetons leur joug loin de nous !

Ce Psaume s'ouvre moins par une interrogation que par une apostrophe aux nations. Le psalmiste est certain en réalité que leurs agitations face au Seigneur et à son messie sont vaines. Le messie n'est autre que le roi d'Israël dès qu'il a été sacré (1 S 16, 13) et il représente tout Israël.

Se sentant esclaves de Dieu et du messie, les nations veulent s'affranchir et mener leur propre vie. Avoir sur le cou, tel un buffle de labour (Jb 39, 10 ; Os 10, 11), un joug fixé avec des courroies, est une image classique de la dépendance à l'égard d'un prince. Ici le cri de révolte émanerait des peuplades palestiniennes chassées de leur pays lors de la venue du peuple de Dieu, et des nations voisines tenues en respect ou en tutelle par Israël. Mais le joug est aussi le symbole de la Torah, l'enseignement divin, et d'après les Pères, puisqu'il est en général fait pour deux animaux, il représente les deux commandements qui n'en font qu'un de l'amour de Dieu et du prochain.

4 Celui qui habite dans les cieux se rira d'eux,
le Seigneur les tournera en dérision.
5 Alors il leur parlera dans sa colère
et dans sa fureur les effraiera :
6 “Moi, j'ai institué mon roi
sur Sion, ma montagne sainte !

Le Seigneur domine le vain murmure et la conspiration des nations. Il siège dans les hauteurs, inaccessible, sûr de ses desseins. Son attitude de moquerie et de colère ne fera que confirmer la consécration de son roi, et visera aussi à la conversion des nations si elles refusent de se soumettre. Leur rébellion est donc inutile devant le don d'un roi qu'Il a fait à son peuple. Le verset 6 est une allusion au sacre royal à Jérusalem (2 S 7, 11-16) ; avec le prophète Isaïe, Sion désignera le Temple et plus particulièrement le sanctuaire.

 7 Je publierai son décret.
Le Seigneur m'a dit : “Tu es mon Fils ; moi, aujourd'hui, je t'ai engendré.
8 Demande-moi, et je te donnerai les nations pour héritage
et les confins de la Terre pour possession.
9 Tu les régiras[TM : briseras / LXX : paîtras] avec une verge de fer
et comme un vase de potier tu les fracasseras”.

Le messie proclame le décret de son investiture qui lui confère la lieutenance de Dieu dans le monde et la domination sur les nations. C'était la coutume de remettre au roi, avec le diadème (Ps 89, 40) et les divers insignes de sa dignité, l'acte officiel attestant son élévation à la royauté (2 R 11, 12 ; 2 R 19, 20-28). Selon une conception commune à toute l'antiquité, l'investiture royale s'exprime dans le rite d'une adoption filiale par la divinité. Le roi ainsi adopté devient l'alter ego de la divinité. Le mot aujourd'hui a d'abord un sens historique qui n'exclut pas un caractère de pérennité. Certains Pères de l'Église, s'appuyant sur He 8, l'entendent de la génération éternelle du Verbe. Les Apôtres en parlent comme de la Résurrection (Ac 13, 33). On peut aussi le rapprocher des mystères de l'Incarnation et du Baptême du Seigneur comme le fait la liturgie.

Le royaume du messie est établi non par les armes, mais par la prière Demande-moi. Le messie, étant fils de Dieu, hérite de toutes les nations du monde et pas seulement de la Terre sainte (Dt 20, 16 ; Mi 5, 3 ; Za 9, 10 ; Mt 28, 18). Son pouvoir peut être destructeur (Ap 2, 27) et sa victoire est certaine, puisque Dieu la lui a promise. La victoire du messie se réalisera soit par la soumission, soit par la destruction des nations, selon leur comportement. Israël demeure persuadé que ce qui a été promis autrefois à David (2 S 7, 14) le concerne encore aujourd'hui.

10 Et maintenant, rois, comprenez ; laissez-vous instruire, vous qui gouvernez la Terre.
11 Servez le Seigneur dans la crainte, et exultez pour lui avec tremblement.
12 Saisissez la discipline [LXX et Vulg.][1],
afin qu'il ne s'irrite et que vous ne périssiez en chemin,
lorsque sous peu s'enflammera sa colère.

C'est un appel à la sagesse lancé par le roi-messie. Les rois sont prévenus : s'opposer à Dieu revient à courir à la perdition. Qu'ils fassent donc preuve de bon sens et de religiosité, et renoncent à leur folie ! Jusqu'au dernier moment (Ps 148, 11), ils seront invités à louer Dieu, mais le jugement lui aussi viendra (Ps 149, 7-9).

S. Hilaire, commentant le verset 12 selon le TM, écrit : « Qu'a donc fait Jésus en s'incarnant, sinon d'embrasser notre nature humaine pécheresse et déchue ? Adhérer à lui, c'est comme embrasser à notre tour celui qui nous offre sa nature divine ! » (PL 9, 290).

Heureux tous ceux qui se fient en lui.

Ce verset fait inclusion avec le verset 1 du Psaume 1. Le bonheur est promis à ceux qui choisissent Dieu (Nah 1, 7). Dieu n'est pas un Dieu vengeur. Il veut le bonheur de l'homme. Les Psaumes 1 et 2 se présentent donc comme un avertissement salutaire. À la fin du Psautier, les Psaumes 148 à 150 appellent à une louange universelle. Le Psautier trace le chemin vers ce but. Il révèle l'itinéraire du salut. Au mot « bonheur, béatitude, heureux » qui ouvre le Psautier, correspond le dernier, « alléluia », qui conclut le recueil.

 

[1] TM : « Baisez ce qui est pur ». Le mot bar signifie d'abord “pur” en hébreu. Supposer le sens de “fils” qu'il a en araméen, comme le fait la traduction Syriaque, ne s'accorde pas avec le v. 7 où le mot hébreu bên est utilisé pour “fils”. Le « ce qui est pur » serait alors une allusion à la Loi (cf. Ps 19, 9 où le commandement est qualifié de pur ; Ps 24, 4 qui fait du « cœur pur » la caractéristique de ceux qui cherchent Dieu ; Ps 73, 1 où la bonté de Dieu va à ceux qui ont le « cœur pur », séparé de toute souillure [Ez 20, 38]).